L’agentivité ou l’art d’agir sur ses apprentissages
En pédagogie, l’agentivité est le pouvoir d’un apprenant à agir sur ses apprentissages et à en être acteur. A l’IFCAM, nous en sommes convaincus : un apprenant qui construit lui-même ses connaissances, son savoir et donc ses représentations mentales bénéficie d’apprentissages plus profonds, d’une meilleure mémorisation de l’information, d’un engagement fort et de connexions plus solides entre les informations qu’un apprenant qui serait davantage dans la réception des informations.
Qu’est-ce que l’agentivité ?
Un acteur, au sens premier est une personne qui agit, qui a un rôle, qui est partie prenante dans un projet. L’agentivité c’est le pouvoir d’action d’un être, c’est « sa capacité d’intervention sur le monde et sur les autres ». En pédagogie, c’est le pouvoir d’un apprenant à agir sur ses apprentissages et à être acteur de ses apprentissages. Lorsque l’apprenant est actif et fait usage de son pouvoir, il est agent de ses actions et fait donc preuve d’agentivité.
Pourquoi s’intéresser à l’agentivité en formation ?
S’intéresser à l’agentivité en formation, c’est s’intéresser aux capacités des apprenants à construire eux-mêmes leurs savoirs. Un apprenant qui construit lui-même ses connaissances, son savoir et donc ses représentations mentales bénéficie d’apprentissages plus profonds, d’une meilleure mémorisation de l’information, d’un engagement fort et de connexions plus solides entre les informations qu’un apprenant qui serait davantage dans la réception des informations. C’est le courant du constructivisme qui a permis de mettre cela en évidence.
Dans cette perspective constructiviste, l’agentivité n’est pas une capacité innée, elle se construit et se développe tout au long de la vie et notamment par le biais des feedbacks.
Partons d’un constat pratique. Lorsque un apprenant fournit un travail et demande des retours au formateur, il attend un feedback. En fonction de ses croyances en ses capacités, l’apprenant anticipe le type de feedback qu’il va recevoir. S’il ne se croit pas capable d’effectuer le travail demandé, ses attentes sont faibles et à l’inverse s’il s’en sait capable, ses attentes sont fortes.
Si le travail est adéquat et convient à ce qui était demandé, le formateur peut renvoyer un feedback positif et encourageant à l’apprenant. Se voir réussir fait vivre à l’apprenant des expériences actives de maîtrise (Bandura, 2003). Ces expériences confirment à l’apprenant qu’il a été capable de produire un travail de qualité et en adéquation avec la consigne. Ce feedback permet de renforcer les croyances en ses capacités, peu importe son niveau de croyance à la base. A l’inverse, si les croyances de l’apprenant sont fortes et que le feedback lui renvoie que son travail ne correspond pas aux attentes, sa croyance en ses capacités diminue et sera plus basse pour ses futurs travaux. La forme du feedback est très importante pour permettre à l’apprenant de l’accepter, rebondir et s’en servir pour être en adéquation avec les futures attentes du formateur.
Ces croyances sont conceptualisées sous le terme d’auto-efficacité : « la croyance de l’individu en sa capacité d’organiser et d’exécuter la ligne de conduite requise pour produire des résultats souhaités » (Bandura, 2003).
L’auto-efficacité est la clé de l’agentivité (Bandura, 2001). Cette croyance permet de :
– Faire face aux obstacles et les surmonter
– Orienter et piloter la persistance dans la tâche
– Se fixer des buts ambitieux et à la hauteur des compétences
– Renforcer l’engagement, l’intérêt et par extension, la motivation
Le travail en groupe est une modalité qui créé une dynamique d’une auto-efficacité collective et est également un facteur qui favorise l’intérêt et donc le maintien dans la tâche.
Innovation et agentivité
En 2018, Nagels, Abel et Tali ont mené une recherche sur l’innovation et l’agentivité des apprenants. Ils décrivent l’innovation en pédagogie comme la recherche de l’amélioration de l’existant. Le but est de favoriser les apprentissages en mettant à disposition des environnements de formation pertinents qui suscitent l’intérêt des apprenants.
Pour cela il faut agir, tester, créer et se tromper (notion de droit à l’erreur). Leur recherche porte principalement sur les environnements de travaux numériques. Les participants de l’étude appartiennent à un groupe qui possède un environnement numérique de travail. L’entrée s’y fait par carte sémantique ou carte conceptuelle (mind map : voir l’exemple ci-dessous) pour accéder aux ressources. Les cartes et les ressources peuvent être annotées. Chaque apprenant a accès aux annotations de son groupe et peut comparer son espace de travail avec celui des autres groupes. La facilité d’accès aux ressources et l’apprentissage avec les pairs sont également des principes chers à l’IFCAM.
Ces chercheurs proposent 5 pistes à étudier pour la mise en place d’un environnement d’apprentissage innovant :
– Agir sur l’environnement en lui-même et pas uniquement sur son contenu
– Proposer des ressources interactives
– Favoriser la construction par l’apprenant de son environnement d’apprentissage personnel
– Autonomiser les apprenants sur la recherche des savoirs
– Sensibiliser à l’autorégulation et à la responsabilité des apprentissages pour renforcer l’agentivité des apprenants.
En somme, les feedbacks, les environnements de travail, les travaux en groupe représentent des leviers intéressants pour amener l’apprenant à croire davantage en ses compétences. Croire en ses compétences c’est faire un premier pas vers l’agentivité et vers l’autorégulation de ses apprentissages.
Camille Besson, alternante chargée de projets Expérience Apprenant.
Bibliographie :
Bandura, A. (2001). Social cognitive theory : an agentic perspective. Annual review of psychology, 52, 1-26.
Bandura, A. (2003). Auto-efficacité. Le sentiment d’efficacité personnelle. Bruxelles : De Boeck.
Nagels, M., Abel, M.-H., & Tali, F. (2018). Focus on the Agency of Learners to Innovate in Pedagogy. In A. Visvizi, M. Lytras, L. Daniela. The Future of Innovation and Technology in Education : Policies and Practicies for Teaching and Learning Excellence. Bingley, United Kingdom : Emerald Publishing Limited
Parler d'agent invité est une tendance nouvelle génération pour dépasser des approches désuètes et surannées. Soulignons que l'innovation a remis en question nos représentations de l'agir enseignant en incitant tous et toutes á trouver des alternatives , approches gagnantes , positives et inclusives, en quête d'une École constamment réinventée et performante . . Parler d'agentivité est un concept qui émerge pour nous permette d agir autrement mais efficacement pour promouvoir de meilleures conditions oû l'élève serait partisan de son propre savoir .
Bonjour, Merci pour votre commentaire :) Tout à fait, d'où l'importance d'innover et d'adopter de nouveaux angles de vue. Rendre les élèves à l'origine de leurs savoirs est primordial pour construire des connaissances durables. Bonne journée, Camille Besson