4 chefs d’orchestre à la loupe de Process Communication
La Process communication est un modèle de connaissance de soi, et des autres, développé aux Etats-Unis par le Docteur Taïbi Kahler pour accompagner les équipes de la NASA sur la mission Apollo.
Cet article s’inscrit dans une série qui se propose d’illustrer le modèle Process communication et la richesse de ses concepts au travers d’exemples concrets. Les mots en italique font référence aux concepts du modèle process communication.
Qu’est-ce que Process Communication ?
Le modèle propose une analyse par type de personnalité au nombre de six : Empathique, Rebelle, Travaillomane, Persévérant, Promoteur et Rêveur.
Le modèle repose sur le principe que nous avons chacun ces six types dans notre « immeuble » de personnalité, chacun étant plus ou moins développé. La diversité des profils de personnalité au sein de chaque individu caractérise notre singularité. Elle permet ainsi de créer des liens interrelationnels constructifs avec notre entourage qu’il soit professionnel ou personnel, d’ouvrir nos champs de vision des situations que nous vivons ensemble mais différemment selon qui nous sommes.
Process Com et « Parties de personnalité »
Je propose de décrypter un des concepts du modèle : les « Parties de personnalité », à savoir un comportement non verbal ou forme d’agir, en l’illustrant avec quatre grands chefs d’orchestre, chacun, en plein exercice de conduire leurs musiciens lors d’un concert… Un même métier, un même orchestre, et un même objectif jouer de la musique ensemble caractérise ces quatre personnalités. Pourtant chacun d’eux joue de manière radicalement différente. Pas de jugement de valeur sur ce qui est bien ou ne l’est pas. Un même métier peut être exercé de manière quelque peu ou radicalement différente. Décrypter ces parties de personnalité permet de refléter la personnalité singulière de celui qui occupe la fonction.
Je vous invite à profiter de la lecture de cet article pour décoder, en toute spontanéité, votre propre perception des communications non verbales que vous visualiserez avec ces extraits. N’hésitez pas à définir ce qui vous semble convenir le mieux et ne vous conviendrait pas.
Léonard Bernstein, Carlos Kleiber, Ricardo Mutti et Johann Strauss nous accompagneront pour illustrer les quatre parties de personnalité de la Process com, qui sont « Réconforteur », « Emoteur », « Directeur » et « ordinateur ». Nous sommes tous en capacité d’activer chacune des parties de personnalité, selon notre « immeuble » de personnalité, il est donc probable que vous détectiez deux, voire trois, parties de personnalité dans ces exemples.
La communication non verbale de 4 chefs d’orchestre analysée par le prisme Process Communication
Leonard Bernstein, artiste de ce magnifique film culte West Side Story, nous avait déjà invité à découvrir sa sensibilité, sa subtile capacité à retranscrire la complexité des relations entre deux bandes de jeunes qui s’opposent et que tout oppose (du Bronx à New York dans les années 1950 / 1960 avec la magnifique Nathalie Wood). Pour ma part, Leonard Bernstein, chef d’orchestre dans l’extrait qui illustre mes propos, me fait littéralement vibrer. Une belle caisse de résonance qui vient toucher en plein cœur mon besoin de relations chaleureuses mais aussi créatives et spontanées. Je sais d’ores et déjà que j’aurais aimé, adoré ?, être l’une des leurs dans son orchestre sous sa direction. Je pourrais aussi dire de manière plus pragmatique que dans cette scène j’aurais été dans mon élément auprès de ce chef d’orchestre.
Et pourquoi cela ? Leonard Bernstein active sa partie de personnalité dite « réconforteur », en écho avec la partie de personnalité dite « émoteur ». Observez ses mimiques, ses petits clins d’œil, ses mouvements de bouche comme s’il embrassait ses musiciens. Un mouvement de tête autoritaire aussitôt rattrapé par un regard espiègle, et un petit sourire en coin. Sa gestuelle, bras replié sur lui, sa baguette n’assure aucune fonction, sa seule présence suffit comme le regard bienveillant qu’un parent porte à sa progéniture. Il les protège par des regards, des sourires et une gestuelle protectrice et en même temps il joue avec eux. Il instaure un climat de confiance qui permet au collectif d’exprimer son talent, se mettant à l’écart, pour les laisser librement exprimer les notes de musiques qui résonnent dans la salle harmonieusement.
Extrait de la conférence Tex X d'Itay Talgam: Diriger comme un grand chef d'orchestre
Carlos Kleiber, quant à lui, joue pleinement sur le registre de la partie de personnalité dites « émoteur ». Observez la différence des deux chefs, pour relever les subtilités de ces deux personnalités.
Extrait de la conférence Tex X d'Itay Talgam: Diriger comme un grand chef d'orchestre
Carlos Kleiber lui dans sur la scène, il s’adresse plus au public que son orchestre, invente quelques pas de danse. Se donne des libertés de chorégraphier dans une dynamique ludique la musique qui se joue. Négligemment, il fait tourbillonner sa baguette, l’autre main dans sa poche comme s’il prenait un verre accoudé au zinc d’un bar. Puis sa main qui remplace sa petite baquette de chef d’orchestre virevolte dans les airs, signifiant à ses musiciens « Allez les gars, pas besoin de moi ». Il devient le spectateur-acteur qui épouse les mouvements de la musique, et non plus celui qui dirige.
Dans une dynamique tout à fait opposée, prenons le Chef d’orchestre, Ricardo Mutti. Visionnez le film avant que je vous apporte la réponse… Commencez à affiner votre perception de la scène. Que diriez-vous si vous deviez qualifier vous-même cette « partie de personnalité » ?
Extrait de la conférence Tex X d'Itay Talgam: Diriger comme un grand chef d'orchestre
Mais bon sang c’est bien sûr ! Directeur. Car il dirige le bonhomme. C’est clair, net, il est totalement investi dans son rôle avec de grands gestes autoritaires. Il donne le rythme, une baguette qui agit dans un parfait contrôle. Le regard froncé, des hochements de tête de haut en bas vifs. Il n’y a pas de place à l’émotion, il mène ses artistes du bout de sa baguette, au rythme de sa lecture de la partition. Autant acteur que l’orchestre, il ne fait pas de pas de côté comme nous avons pu l’observer avec Leonard Bernstein et Carlos Kleiber. Aucune place n’est donnée à l’improvisation, au jeu ou même à la créativité. La partie qui se joue est sérieuse. A l’intersection du public et de l’orchestre, il en est le pivot.
Chez Johan Strauss le registre de partie de personnalité est tout autre que ce que j’ai décrit jusqu’à présent. Emotion du visage ? aucune. Un visage lisse ne laissant transparaître aucune expression. Il fait le job de manière mécanique. Il lit la partition, hochement de tête comme pour confirmer que la musique est le reflet de la partition. Petits gestes simples avec sa baguette, de l’autre main il indique comme un temps d’arrêt, notifiant à ses musiciens de ralentir. Cette partie de personnalité dite « ordinateur » agit tel que son nom l’indique de manière mécanique, voire binaire. L’émotion a peu de place.
Extrait de la conférence Tex X d'Itay Talgam: Diriger comme un grand chef d'orchestre
Ainsi nous avons pu observer et décrypter ces quatre parties de personnalité, langage non verbal, qui nous donne des indices sur le comportement de nos pairs, leur manière de fonctionner. Il n’y a pas à convenir que l’un est mieux que l’autre, mais plus à se poser la question de ce qui me convient et me convient moins. Aller aussi sur ce qui nous convient moins pour nous faire découvrir de nouveaux champs ou pratiques qui nous enrichissent. L’objectif est donc de les découvrir et d’apprendre sur nous.
Isabelle Holie, Responsable des Achats Pédagogiques